Traversée de l'Iran

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9. Du pourri au ripou

Shīrāz, Iran (18/08/2006)

Du pourri au ripou Glissez ici une photo de l'étape Retirer cette photo

Nous quittons le Mausolée sous le regard frustré du mini-boxeur. Nos pas nous portent dans les hauteurs du bazar où nous sommes interceptés par Reza, qui s’improvise notre guide. 22 ans, pantalon blanc, chemise blanche, Reza est bien différent des jeunes que nous avons rencontrés jusqu’ici. Ouvertement athée, il critique sans ambages le gouvernement, rêve d’ouvrir un restaurant à Manchester, est déjà passé par la case prison suite à un différend avec l’agence de voyage locale et arbore une longue cicatrice au bras gauche, vestige d’une bagarre au couteau, un an plus tôt. En bref un bad boy, mais malgré tout, fort sympathique.

Nous le suivons. Il nous ouvre des portes, celles de l’école coranique, de la maison du roi, d’un mausolée anonyme et oublié par le Lonely Planet. Photos de jardins intérieurs, photos depuis les toits et photos de bassins privés… les loquets se défont sous la poigne de Reza et des billets voyagent de nos poches aux mains des gardiens.

Notre soif de visites assouvie, nous prenons le chemin de l’hôtel. Un homme nous hèle : "Mister, Mister !" A cet appel que nous entendons 100 fois par jour, nous répondons par un vague salut. "Police". Le nouveau venu sort sa carte, nous indique dans un anglais approximatif que notre guide est un "bad man", nous mime un vol à l’arraché. Une discussion animée s’engage entre les 2 hommes, bientôt rejoints par un troisième larron à scooter, arrêté par Reza. Nous assistons impuissants à 10 minutes de palabres à l’issue desquelles Reza et son ami enfourchent le scooter et disparaissent.

Le policier, Hamed, calme et posé, se tourne vers nous. S’excuse pour ces désagréments, veut nous poser quelques questions. C’est bien naturel, nous y répondrons avec plaisir. L’interrogatoire commence.
- D’ou venez-vous ?
- De France.
- Quel age avez-vous ?
- 28 ans.
- C’est normal en France, 2 hommes qui baisent ?
Nous rentrons dans la 4 ème dimension.

Il nous raconte un voyage qu’il a fait à Marseille, durant lequel un homme lui a fait des avances (il nous précise qu’il avait accepté de venir chez lui, de se doucher, d’aller au hammam avant de recevoir cette proposition indécente). "Bien sûr, c’est dégoûtant ! N’est-ce pas ? Vous êtes bien d’accord ? Hein ! Non ?"

A ce stade de la conversation, ces questions peuvent avoir 2 significations :
1) Hamed est homosexuel et tente d’obtenir nos faveurs par des moyens détournés.
2) Il essaie de nous faire dire que nous sommes homosexuels, ce qui est illégal ici et passible de quelques coups de bâton.
Nous exprimons donc un profond dégoût pour ces pratiques sataniques, à l’aide de force grimaces, hochements de tête virulents et crachats par terre (enfin presque).

Tout en nous dirigeant vers l’hôtel, nous subissons un feu nourri de questions tournant autour de l’homosexualité. "Comment appelle-t-on 2 hommes qui font l’amour ?" (après concertation, c’est ainsi que nous interprétons la question initiale : "What name penis-penis fuck ?"). Nous rions sous cape. A la question suivante : "What name woman penis ?", nous supposons qu’il veut connaître le nom anglais de l’organe sexuel féminin. Et c’est ainsi que Manouch se retrouve à écrire dans le carnet de Hamed, policier iranien de Shiraz, les mots :
- VAGIN
- PENIS
- GAY
- LESBIAN
suivis des symboles masculins et féminins.

Nous sommes quasiment arrivés à destination. Allons-nous nous séparer ainsi ?? Que nenni ! Voici le bouquet final qui s’annonce : "C’est quoi sucer ?" (son ami marseillais semble lui avoir proposé une gâterie). Nous sommes maintenant morts de rire. Tentative d’explication grâce à l’image du cornet de glace, puis du mot "penis" qu’il connaît. Silence. Compréhension. Crachat par terre.

Nous nous séparons enfin sur une chaleureuse poignée de main. Pas facile de draguer les touristes par les temps qui courent…


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